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Ces textes sont livrés presque "brut de décoffrage" aussi : soyez indulgents ! Ils sont souvent circonstanciels, sans grande prétention théologique.
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lundi 3 octobre 2016

Prédication du 2 octobre 2016 - Philippiens 1.8-11 - Un amour qui abonde



Commençons par une question : lorsque vous priez pour vos amis chrétiens, que demandez-vous pour eux ? Quelles sont les choses importantes par dessus tout que vous demandez à Dieu de leur accorder ?
Bien sûr vos réponses sont certainement variées - la santé pour les uns, la paix pour d’autres, un travail, etc. 
J’ai été interpellé par l’exemple que l’apôtre Paul donne dans ce domaine : 
Voilà ce qu’il écrit aux chrétiens de Philippes, au tout début de sa lettre : 

« Ce que je demande dans mes prières, c’est que votre amour abonde/déborde de plus en plus en connaissance et en vraie sensibilité ; qu’ainsi vous sachiez discerner ce qui est important, afin que vous soyez sincères et irréprochables pour le jour du Christ, et que vous soyez remplis du fruit de justice qui vient par Jésus-Christ, à la gloire et à la louange de Dieu ». (1.8-11)

Alors que nous parlons beaucoup, ces derniers temps, de croissance - croissance spirituelle, croissance de l’Eglise - « grandir ensemble en Eglise »… ce passage m’a touché. 

  1. Au coeur de la vie d’église, la qualité de la relation

Pourquoi ? Parce qu’il parle de croissance, mais de la croissance de l’amour. Et même de la croissance dans l’amour. 
Le week-end dernier, Chris Short, l’orateur de notre WE, spécialiste de la croissance de l’Eglise, nous a expliqué que l’Eglise du XXIe devait être relationnelle ; que la relation était plus que jamais placer au coeur de la vie d’Eglise. 
Même écrite dans les premiers siècles de notre ère, la prière de Paul ici résonne fortement avec cette affirmation : le plus important, prie Paul, c’est que les Philippiens approfondissent leurs relations et s’aiment de plus en plus.

Paul aurait pourtant bien d’autres sujets de prière pour eux. Cette Eglise à laquelle il écrit affronte bien des problèmes internes. De faux apôtres se sont glissés en son sein, et ils séduisent les gens par de beaux discours pleins de mensonges et d’hérésie. Des divisions apparaissent.
L’apôtre aurait pu leur écrire : « ce que je demande dans mes prières, c’est que vous trouviez les bons arguments théologiques pour contredire ces imposteurs » ou « c’est que vous trouviez une nouvelle organisation qui vous permette de mieux vous défendre »…

Mais non. La priorité face aux tensions, aux inquiétudes et aux divisions, c’est d’aimer davantage. 

Ainsi donc, le fait que Paul accorde une telle priorité à la croissance de l’Eglise dans l’amour m’a interpellé. 
Dans notre désir de « grandir ensemble en Eglise », nous pensons à annoncer l’Evangile dans la région Rhône-Alpes, à mieux nous organiser pour mieux accueillir, nous travaillons notre façon de louer Dieu et d’accompagner les enfants et les jeunes…
Mais pensons-nous à approfondir nos liens d’amour ? 

En lisant Paul, je me suis posé la question. C’est comme si on se concentrait sur tout sauf sur ça, qui est pourtant l’essentiel.
Nous parlons vite projets, bâtiments, lieu…
Paul lui nous parle de la qualité de nos relations. 
Et sa prière nous ramène simplement au coeur de notre appel de chrétien : « aimez Dieu de tout votre coeur, aimez vous les uns les autres ». « C’est à l’amour que vous aurez les uns pour les autres que tous sauront que vous êtes mes disciples ».   
Rien de nouveau, direz vous. C’est vrai. On est presque déçus : quoi de plus banal dans une Eglise que de dire : l’amour c’est le plus important ?
Pourtant, c’est une réalité qu’on perd rapidement de vue, surtout lorsqu’on est pris par bien des préoccupations, par nos engagements…
Engagement dans l’Eglise qui signifie souvent pour nous : intégration dans un groupe d’activité. Quand des personnes me disent, un peu de gênées : « oh, je sais, je ne suis pas très engagée… », elles pensent généralement à ça.
Or la prière de Paul nous rappelle que notre premier engagement de chrétiens est celui du coeur : s’engager à déborder d’amour pour Dieu et à déborder d’amour pour les autres. 
Je peux ne rien faire de visible et être extrêmement engagé de coeur auprès de mes frères et soeurs - c’est le cas de tous ceux qui prient activement pour nous

Engageons-nous donc à déborder d’amour les uns pour les autres ! 
Mais de quel amour parle-t’on ? 

2.  Quel est la nature de cet amour pour lequel Paul prie ? 
Dans notre culture, l’amour est perçu comme un sentiment qu’on ne maîtrise pas ; un jour il vient, un autre il part. Les chansons de Maître Gims ne racontent que cette histoire-là.
On pense que l’amour est enfant de bohême, et qu’on n’a aucune prise sur lui. 
Mais l’amour dont parle Paul n’est pas seulement un sentiment d’amour qui devrait déborder - et on se ferait des bisous passionnés à la sortie du culte, ce serait génial. 
Ce n’est pas seulement de la gentillesse ou de la convivialité sympathique.
Le sentiment, c'est important certes ! Mais l’amour qui jaillit du coeur même de Dieu, tel qu’il nous apparaît dans la personne de Jésus est plus profond : il implique aussi la volonté et l’intelligence - Paul parle de « connaissance », de « discernement ».
C’est un amour fait de don de soi et d’attention portée à l’autre. Un amour humble qui donne sans chercher son propre intérêt : Tel est l’amour de Dieu qui est au cœur de notre foi : « Dieu a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique »…
Amour qui se révèle parfaitement dans la personne de Jésus, au point que Paul résume ainsi la ligne à suivre : « Que votre attitude soit identique à celle de Jésus-Christ ». 
« Conduisez vous d’une manière digne de la bonne nouvelle du Christ… ne faites rien par ambition personnelle ni par vanité ; au contraire, avec humilité, estimez les autres supérieurs à vous-mêmes. Que chacun, au lieu de regarder ce qui lui est propre, s’intéresse plutôt aux autres » (2.3-4).
Cet amour là ne rend ni aveugle ni idiot ! Au contraire, il éclaire le regard que nous portons sur les autres, éclaire aussi notre attitude envers eux. 
Cet amour-là « abonde en connaissance » et donne le « discernement » - éclaire à la fois notre connaissance de Dieu et notre façon d’agir. 
En aimant les autres d’un amour qui ne cherche pas son propre intérêt, nous apprenons aussi  à connaître le Dieu qui nous a aimés le premier. Par exemple, quand nous nous faisons violence pour pardonner celui qui nous a blessés, nous entr'apercevons la profondeur de ce que Jésus a fait pour que nous soyons pardonnés. 
Et nous l’aimons encore davantage !
En aimant les autres comme Dieu les aime, nous apprenons à être plus patients et indulgents envers eux. Dieu nous fait grâce, nous faisons grâce. Cela éclaire notre façon d’agir et de discerner l’important qui vaut la peine de se battre - et le reste. Cela nous aide à agir toujours plus comme Jésus a agi, et nous faisons ainsi sa volonté - nous produisons ce « fruit de justice qui vient par Jésus-Christ » : fruit de paix, de joie… 

En somme, plus nous ferons des efforts pour aimer, plus cela nous rendra humbles, et donc plus disponibles à l’action de Dieu, qui pourra alors nous faire « déborder » d’amour - agrandissant toujours plus l’espace de notre coeur, élargissant notre façon de voir.

Vous voyez, le cercle est vertueux. 
3. Comment cet amour peut-il abonder ? 

Je le lis dans vos yeux : devant un si beau programme, comment ne pas se sentir petit ! Si c’est par humilité, c’est positif : d’abord, reconnaître que sans Christ nous ne pouvons rien faire. 
Mais que cela ne nous décourage pas de relever le défi ! 
Car Dieu attend de nous de la bonne volonté, de la « ferveur ». Que nous fassions tout notre possible pour approfondir nos relations avec les autres chrétiens. Pour cela, les occasions sont nombreuses. 
Revenons par exemple aux groupes de service, d’activité évoqués tout à l’heure. Ils sont un lieu privilégié d’engagement, c’est vrai : d’engagement dans le service, et d’engagement du coeur pour apprendre à aimer les autres d’un amour qui abonde en discernement !

Prenons le cas de quelqu’un qui s’engage à la sono. « Toute ressemblance avec une personne existante… ». 
Il y a des besoins, la personne se dit qu’elle peut être utile, et puis ça l’intéresse. Tout au long du culte, elle s’applique à régler le son le mieux possible, par amour, dans l’intérêt des autres, pour qu’ils puissent bien entendre la Parole de Dieu, et se concentrer sur ce qui est dit. Ou qu’ils puissent louer le Seigneur en entendant bien la musique. 
Les choses se compliquent quand à la fin, des personnes l’attrapent pour se plaindre ! L’une trouve que c’était trop fort, l’autre qu’on n’entendait pas assez la batterie… C’est là où l’amour devient un engagement persévérant, et demande du discernement ! 
Quelle va être la réaction de l’amour face à ces récriminations ? Que répondre ? Comment régler de la façon la plus appropriée ensuite ? 

Et on pourrait dire la même chose à propos de la personne qui projette les chants… dans l’intérêt des autres, puisqu’ils puissent louer Dieu sans faire du play back ! 
De ceux qui accueillent les tout-petits 20 mn avant le début du culte, pour les rendre une demi-heure après… par amour des enfants mais aussi des parents - pour qu’ils puissent vivre tranquillement leur culte ! (pensez à aller vite chercher vos enfants). 
De ceux qui prennent deux heures de leur semaine pour nettoyer l’église de fond en comble, par amour là encore, pour que nous entrions dans des locaux accueillants, que nous appréciions d’y passer du temps, d’y prolonger nos échanges…

L’expérience montre que dans une assemblée de pécheurs comme celle que nous formons, c’est un défi de servir et d’aimer les autres comme ils sont, ces autres souvent plus enclins à remarquer le Larssen qui interrompt l’orateur, la video qui ne démarre pas ou la miette qui traîne, qu’à encourager et remercier. Mais c’est aussi comme cela qu’on apprend à servir vraiment avec l’amour de Christ, en pardonnant ces écarts, en cultivant un regard d’indulgence et de grâce - parce que nous voulons avant tout réjouir le Dieu de grâce, dans cet amour qui ne cherche pas son propre intérêt. 
Quand à nous qui profitons de ces services, que l’amour nous aide aussi à discerner ce qui est important : est-il plus important de faire vite un retour critique sur ce qui n’a pas fonctionné, ou de remercier et d’encourager nos frères et soeurs ? 

J’aurai pu évoquer aussi les groupes de maison (cf Chris). Idem : lieu privilégié.

Je n’insiste pas sur ce sujet. 

Ainsi, c’est bien en servant ensemble, en priant ensemble, en partageant des moments plus intimes que notre regard les uns sur les autres pourra évoluer positivement. Mais ce sera dur parfois ; on va s’agacer, se vexer, s’emporter…

En persévérant dans la relation, malgré tout, notre amour pourra « abonder », et nous grandirons en « connaissance et en vraie sensibilité ». 

4. Rester unis dans l'amour, en discernant ce qui est important 

Je voudrais finir en faisant un lien entre la situation des Philippiens et celle de notre Eglise. 

Paul prie pour que l’amour des Philippiens, en abondant, leur permette de mieux distinguer l’essentiel et le secondaire. Sa préoccupation en temps de trouble est d’abord que l’unité de coeur, l’unité spirituelle des Philippiens soit renforcée. 

Alors que notre Eglise locale réfléchit à son avenir, la préoccupation de Paul nous concerne directement. 
En ce moment même, le conseil travaille activement (1 ou 2 réunions/semaine rien que pour ça) sur la base des questionnaires que vous avez remplis, pour préparer la réunion de membres de novembre. Ensuite, il y aura des décisions importantes à prendre, qui entraîneront des changements. Nous ne savons pas encore ce que l’Eglise décidera, mais il y aura forcément des avis divergents, des désaccords sur ce qui est « non négociable », « secondaire » ou « important ». 
Prions qu’alors, notre amour, ancré en Dieu, passe le test, et que cet amour que nous avons déjà les uns pour les autres nous garde unis au milieu des débats
Que nous nous regardions les uns les autres avec bienveillance et grâce. Que par amour nous réfléchissions non pas seulement à partir de ce qui nous arrange, mais ce qui est dans l’intérêt du plus grand nombre. 

« Ayez un même amour, un même cœur, une unité de pensée » (Philippiens 2).

C’est une autre prière de Paul pour les Philippiens. Qu’elle soit aussi la nôtre. 

Et pour que Dieu nous donne ce même coeur, je nous encourage à prier les uns pour les autres, comme Paul le fait ici. Priez aussi pour le conseil. 
Prier pour quelqu’un, c’est l’aimer. Cela nous gardera les yeux fixés sur Jésus. Nous pouvons puiser l’amour en lui, par le Saint Esprit. Nous pouvons lui demander de faire abonder et même surabonder l’amour entre nous, pour la seule gloire de Dieu ! 

Qu’il nous permette d’être « sincères et irréprochables » lorsque Jésus reviendra, et « remplis du fruit de justice qui vient par Jésus-Christ, à la gloire et à la louange de Dieu ».


Amen. 

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Philippiens 1.9-11
Questions pour discuter en groupe


I. Quelques mots sur la lettre aux Philippiens : 
Philippes, colonie romaine entre la Grèce et les Balkans, est la première ville d’Europe où Paul ait préché l’Evangile. Il y fonda une Eglise lors de son premier voyage missionnaire (Actes 16.12-40). Quelques années plus tard, alors qu’il est prisonnier (sans doute à Rome), Paul écrit aux Philippiens une lettre au ton particulièrement chaleureux. On l’appelle même « l’épître de la joie » car ce thème traverse la lettre d’un bout à l’autre. Cette joie est liée à la fidélité au Christ, dont l’oeuvre est célébrée dans l’hymne de 2.6-11 (voir prédication du …) 

Paul remercie les Philippiens qui lui ont fait parvenir de l’aide matérielle. Il les encourage aussi à rester fidèles au Christ et à ne pas se laisser séduire par de fausses doctrines qui s’insinuaient dans leur communauté. 

Le premier chapitre insiste sur la communion qui existe entre Paul et les Philippiens : ils sont « partenaires dans l’Evangile ». Paul utilise plusieurs mots de la famille de koinonia  pour dire que les Philippiens et lui sont en communion spirituelle à la fois avec Dieu par Jésus-Christ et entre eux. Là est là source de leur amour fraternel. 

II. Un amour qui abonde

1. Lisez Philippiens 1.1-11 : 
Nous construisons le plus souvent nos relations en fonction de nos affinités. Sur quoi repose la l’amour  de Paul pour les Philippiens ? 

Piste : Lisez 1.5 ; 1.6-7 

2. Quelles différences remarquez vous entre l’amour « selon la Bible » et l’amour « selon notre culture actuelle » ? Ces différences peuvent-elles avoir des conséquences dans nos vies de chrétiens ? 

Piste : relisez 1 Corinthiens 13.4-7 : notre société voit l’amour comme un sentiment, associé au désir et concernant surtout les émotions. Dans la description de l’amour faite par Paul, qu’est-ce qui relève du sentiment ? De la volonté ? 
L’amour selon Dieu est tourné vers l’intérêt de l’autre (voir prédication). 

3. Comment pouvons nous savoir si nous aimons Dieu ? (Jean 14.21-23 ; 1 Jean 5.3)

4. Comment pouvons nous savoir si nous aimons vraiment les autres ? (1 Corinthiens 13.4-7 ; 1 Jean 3.16-18 ; 1 Jean 4.7-21) 

Question personnelle pour la prière : 
Est-ce que votre amour pour Dieu et pour les autres « abonde de plus en plus en en connaissance et en vraie sensibilité » ?
Appliquez pour vous cette prière de Paul, et priez aussi pour les autres du groupe. 


Prédication du dimanche11 septembre 2016 - Luc 2. Luc 2.41-52.


« Ils le trouvèrent dans le Temple, assis au milieu des maîtres, les écoutant et les interrogeant… »



Nous venons de prier pour les moniteurs jeunesse, à qui est confiée la noble et exigeante responsabilité d’accompagner les enfants et les jeunes sur le chemin de la foi. 
Mais au delà des moniteurs, c’est un défi que l’Eglise dans son ensemble est appelée à relever, elle à qui Dieu a confié la mission de transmettre l’héritage reçu en Jésus-Christ - le transmettre dans le monde, mais aussi en son sein, particulièrement aux plus jeunes. (nous aurons vendredi une soirée de prière spéciale sur cela). 

Transmettre, communiquer, enseigner la foi… en la matière, on ne sait jamais vraiment quel mot utiliser, et c’est révélateur de la complexité du sujet : comment faire ?
Parents, grands-parents, oncles et tantes chrétiens, amis… nous avons à coeur que les enfants découvrent l’amour que Dieu leur porte en Jésus-Christ. Mais comment peut-on les y aider ?
Je voudrais aborder le sujet non pas sous un angle « technique » (d’autant qu’il est bien trop vaste pour le cadre de ce matin), mais à partir de la méditation d’un passage de  l’Evangile de Luc, qui attire notre attention sur le parcours de foi… de Jésus lui-même.

Le parcours de foi de Jésus… L’expression peut étonner certains, à juste titre. Le Fils de Dieu avait-il besoin de catéchisme ? Eh bien aussi étrange que cela puisse paraître, l’évangile de Luc est sans équivoque : oui, même Jésus… a dû recevoir un enseignement religieux ! 
On découvre cela dans un des rares textes qui évoque son enfance - mystérieuse période sur laquelle la Bible ne dit quasiment rien par ailleurs. 
Lecture : Luc 2.41-52.

Cet épisode sonne tellement vrai pour tous les parents qui ont, un jour, « oublié » leur enfant quelque part ! N’essayez pas de faire pareil, on surveille ! 
C’est le dernier que Luc rapporte avant que Jésus, rempli d’Esprit Saint, ne se révèle lui-même au grand public comme le Messie, lors de son baptême par Jean-Baptiste (chapitre 4).

Luc, avant et après ce passage, souligne le fait qu’avant de commencer ce ministère public, Jésus a dû apprendre et grandir : 
2.40 : « l’enfant grandissait et devenait fort ; il était rempli de sagesse et la grâce de Dieu était sur lui ». 
2.52 : « Jésus progressait en sagesse, en stature et en grâce auprès de Dieu et des humains ». Littéralement : « il faisait des progrès », « il avançait ». 

Mystère de l’incarnation, étonnant Jésus, à la fois Dieu et homme ! 
Le récit de Luc accueille humblement ce mystère, comme il est. 
Certes, parce qu’il était vraiment Dieu, Jésus possédait de naissance des qualités particulières - la sagesse et l’intelligence sont mises en avant ici. 
Mais parce qu’il était vraiment homme, il a aussi dû apprendre, mûrir et progresser. 
Il a dû être éduqué, y compris dans le domaine de la foi. 
Et pour cela, Dieu l’a confié, lui son Fils unique, à la jeune Marie et à l’humble Joseph, leur accordant ainsi une belle confiance, sans cesser pour autant de veiller sur eux lui-même. Ils ont été le moyen que Dieu a choisi pour que Jésus grandisse dans sa relation avec Dieu le Père.  
Quelle éducation lui-ont ils donné ? La question est intéressante. Et comment ces adultes imparfaits ont-ils pu aider Jésus à devenir celui qu’il devait être ?
Pour répondre à cela, deux passages en particulier ont retenu mon attention : 

v. 41-42 : « Ses parents allaient chaque année à Jérusalem, pour la fête de la Pâque. Lorsqu'il eut douze ans, ils y montèrent selon la coutume de la fête ». 

V.2.46-47 : « (Marie et Joseph) trouvèrent Jésus dans le Temple, assis au milieu des maîtres, les écoutant et les interrogeant. Tous ceux qui l’entendaient étaient stupéfaits de son intelligence et de ses réponses » 
Commençons par le 2e passage. 
Ici Jésus Fils de Dieu manifeste effectivement une sagesse hors du commun. Je m’étais souvent arrêté à cette manifestation de sa divinité sans voir la suite : « écoutant et interrogeant ». Cela, c’est son humanité. 
Nous découvrons que pour grandir, Jésus a eu besoin d’écouter des adultes, et de les interroger. Arrêtons-nous sur ces deux mots qui définissent je crois deux axes à suivre dans l’éducation spirituelle des plus jeunes :  « Ecoutant et interrogeant ».

A. Des adultes à écouter

Luc montre que pour « progresser » Jésus a eu besoin d’adultes à écouter. D’adultes qui lui transmettent les connaissances dont il avait besoin.
C’est ce qu’on fait, du mieux possible, Marie et Joseph. Ils ont élevé Jésus en suivant fidèlement la tradition juive : circoncis le 8e jour, dans les règles, Jésus est ainsi amené au Temple de Jérusalem chaque année pour Pâques. C’est cela qui lui permet de rencontrer les maîtres de la Loi. 
Il est frappant de voir que Marie et Joseph, qui connaissaient pourtant le destin exceptionnel de leur fils ne lui ont pas donné une « éducation de Messie » : « plus tard, mon fils, tu vas devoir être la lumière du monde alors pas question que tu ailles jouer, on va te donner des cours intensifs dès maintenant ». 
En réalité, Jésus n’a pas été élevé différemment des autres enfants juifs, tout « espoir d’Israël » qu’il était. Dans cet épisode, ses parents semblent même avoir oublié qu’il est un enfant spécial ! 
J’y vois une marque de leur humilité profonde et de leur foi sincère. Ce qu’ils transmettent, c’est juste ce qui les fait vivre : la Loi de Moïse, la prière et l’adoration de Dieu dans le Temple de Jérusalem où il avait établi sa présence ; l’histoire de son peuple aussi et de David dont il est le descendant par Joseph. 
veulent juste donner le meilleur à leur enfant, « des racines et des ailes », et plaire à Dieu. Ainsi, ils lui ont appris les fêtes et les rites, qui soutiennent la foi. Nous aussi, en célébrant avec nos enfants Noël et Pâques, en assistant à la Cène ou à des baptêmes, nous leur offrons de tels repères.
En allant au Temple par conviction personnelle, ils ont donné un modèle non de perfection, mais de foi sincère et de cohérence. Voilà peut être le plus important. Et ce qui fait que Jésus les écoute et leur « obéit », malgré leur imperfection. 

Oui, Jésus leur est « soumis » (v.51). Ca alors ! (mouvement de tête général vers le banc des jeunes avec sourires satisfaits)
Jésus qui avait reçu à la naissance la sagesse et l’intelligence, a quand même dû developper ce potentiel en apprenant des adultes - et ce dans un échange attentif. Au Temple, il écoute, avec un profond respect de la parole de ces maitres. Plus tard, il les dépassera et pointera les limites de leur compréhension de la Parole de Dieu, mais d’abord Jésus apprend d’eux. Comme Paul le fera aussi en suivant l’enseignement brillant du pharisien Gamaliel, pour le dépasser.  
Eh oui, l’expérience des aînés a de la valeur. Nous n’avons pas toujours raison, mais pas toujours tort non plus ! 

B. Des adultes à interroger
Mais si Jésus a eu besoin d’adultes à écouter, cela ne suffisait pas : il lui fallait aussi des adultes à interroger, pour forger sa propre pensée et faire une démarche personnelle. 
Ce jour-là, au Temple, il fait cette démarche : laissant partir sa famille, il décide de rester discuter avec les théologiens. Et quand il parle, pour la première fois dans l’Evangile de Luc, c’est pour prendre position devant Dieu : « j’ai à faire chez mon Père ». A 12 ans, il montre par là qu’il a une voix à faire entendre, et une foi personnelle. 

De la même façon, j’ai envie de dire aux plus jeunes : faites entendre votre voix. Cherchez Dieu personnellement, et pour cela n’ayez pas peur d’interroger, d’échanger avec les plus âgés dans la foi. Vous êtes responsables de votre parcours, alors réclamez du solide, ne vous arrêtez pas aux réponses faciles et aux demi vérités.
C’est comme cela que Jésus a compris peu à peu qui il était, et quel appel le Père lui adressait. S’il a pu continuer à « progresser en sagesse, en stature », pendant presque vingt ans avant de commencer son ministère public, c’est en développant une relation toujours plus intime avec Dieu et en même temps en acquérant une connaissance plus juste de lui-même. 
D’une fête de Pâques à l’autre, il a dû lentement approfondir la compréhension de son propre sacrifice, lui qui est « notre Pâque », offerte une fois pour toutes. 
Dans les prophètes, il a trouvé les mots pour définir sa mission - et c’est d’ailleurs en citant Esaïe qu’il donnera son « programme », au début de son ministère (Luc 4).

De la même façon, notre prière « d’aînés » est que vous puissiez vous aussi, au travers de Sa Parole, découvrir Dieu comme votre Père, et découvrir en même temps qui vous êtes, et quel appel particulier Dieu vous adresse - cet appel à une vie pleine et abondante
Que vous compreniez que la volonté de Dieu pour vous, c’est que votre désir profond rencontre le sien, et que vous vous épanouissiez en harmonie avec lui. 

Discerner ce chemin personnel, ce n’est pas simple, et c’est là que nous les aînés pouvons aider les plus jeunes : en encourageant leur questionnement… et en accueillant leurs questions avec humilité… Car quand elles arrivent, elles décapent ! 

Quelques exemples (réels) : 

Jésus avait des frères et sœurs alors pourquoi est-il appelé Fils unique ?

Comment Dieu qui commande « tu ne tueras point » peut-il lui même faire mourir des gens ? 

Est-ce que c'est Dieu qui a envoyé les Assyriens attaquer les Israéliens ?
Pourquoi Dieu a choisi le peuple juif ? Et pas un autre. Est-ce ça veut dire que les autres peuples n'étaient pas sauvés ?

Et d’autres questions, d’adultes cette fois : 

Si Dieu nous aime, pourquoi nous laisser parfois vivre dans la souffrance et pourquoi nous condamner à mourir un jour ? Si son amour était réellement infaillible, pourquoi ne pas faire de nous des êtres immortels ? Pourquoi ne pas supprimer la solitude, les peurs, le deuil, les maladies, les guerres ?
Quelle efficacité de mes prières ? Prier pour essayer de soulager toute douleur au monde est certainement naïf et inefficace. Mais comment accepter l'impuissance de ne pas pouvoir sauver et guérir chacun des êtres dans la souffrance ? Comment réussir à faire confiance à Dieu et accepter que moi, en tant qu'être banal, je ne peux rien faire pour aider à sauver ceux qui souffrent ?

N’ayons pas peur de telles questions. 
Comme les maîtres de la Loi au Temple, prenons le temps de les entendre et les laisser nous interpeller nous-mêmes.
Parmi les gens que je connais, trop de jeunes élevés dans les Eglises sont partis chercher ailleurs des réponses à des questions qu’on ne voulait pas aborder avec eux, ou qu’ils n’osaient pas poser de peur d’être jugés. Pourtant ils avaient soif !
En même temps, j’entends souvent les moniteurs dire : « j’ai peur de ne pas savoir répondre ». 
Mais n’ayons pas peur de dire « je ne sais pas », car d’une part l’Eglise n’a pas pour vocation de transmettre un « prêt à croire » définitivement bouclé, et d’autre part la vie avec Dieu restera toujours pleine de mystères et de questions ouvertes. 
Parce qu’en réalité la foi n’est pas d’abord l’adhésion à un ensemble d’idées bien argumentées mais l’accueil confiant d’une relation d’amour avec Dieu, que nous sommes appelés à découvrir ensemble comme notre Père en Jésus-Christ. 

C’est pourquoi, face à de telles questions le plus important n’est pas l’érudition : il nous revient d’abord d’enseigner fidèlement le peu que nous savons, dans le dialogue, l’écoute et l’amour. 
Le reste est entre les mains de Dieu. Nous faisons ce constat douloureux : certains enfants pourtant bien enseignés, et accompagnés choisissent quand même de s’éloigner de l’Eglise. 
C’est une souffrance pour leurs familles, une inquiétude, une blessure. 
Mais Dieu n’abandonne jamais les enfants qu’il nous confie, et même si nous sommes infidèles, lui il reste fidèle. Jamais il ne leur force la main, mais jamais il ne la lâche non plus

Que cela nous encourage à continuer à prier - pour eux, pour nous, pour ceux qui les accompagnent. 
Je voudrais finir par une image qu’on m’a suggéré à la maison : l’Eglise est comme un groupe en randonnée. Tous en marche dans la vie, à la recherche de Dieu. Les plus expérimentés guident les plus jeunes et leur apprennent à marcher.
Mais en randonnée, vous le savez, tout le monde ne voit pas la même chose. Les enfants s’émerveillent de choses que les adultes, trop concentrés sur l’organisation ou distraits par la routine, ne voient plus. Les questions des plus jeunes gardent les plus âgés éveillés, et entretiennent leur capacité à s’étonner et à s’émerveiller.
A vivre avec Jésus, Joseph et Marie n’ont cessé de s’étonner, de s’émerveiller joyeusement devant ce que Dieu accomplissait. 
Luc dit qu’ils ne comprennent pas tout, mais que ce qu’ils vivent avec Jésus nourrit leur compréhension et leur foi (v.51). Ils ont été secoués dans leurs convictions, mais aussi renouvelés élargis, enrichis. 
De même, les questions des plus jeunes, quand elles nous nous bousculent, sont propres à nourrir notre propre compréhension de Dieu, et à nous garder éveillés, étonnés, ce qui est une qualité essentielle pour marcher avec Dieu. 
Calvin disait : « seul celui ne cesse de s’étonner marche bien selon la Parole de Dieu ».
Que Dieu nous garde ainsi étonnés ensemble - jeunes et aînés
émerveillés ensemble - enfants et adultes, 
curieux ensemble d’en savoir plus sur lui, et attentifs aux belles choses qu’il fait déjà dans ce monde !  


Amen